Edito

Edito N°065

Edito N°065 1

Réinventer la société civile

Une étude menée par le burkinabé, Grégoire Coulibaly, expert burkinabé pour le compte du projet d’appui à la société civile (Pasoc), financé par l’Union Européenne révèle ce que très peu de médias, souvent complaisants avec cette frange de la société, ont dénoncé sinon pointé au cours de ces vingt dernières années. 

L’étude qui a fait l’objet d’un atelier indique sommairement que la société civile tchadienne n’a pu se distinguer comme celle des autres pays à causes d’insuffisance qui relèvent du manque de formation mais aussi du déficit de leadership lié à la personne de ses leaders.

L’expert de l’Union européenne pointe dans son étude l’insuffisance voire l’absence de contrôle démocratique, la difficulté d’accès à l’information et à la formation, les pesanteurs socioculturelles, l’insuffisance des moyens matériels et financiers pour réaliser leurs projets, la maitrise insuffisante de la gestion.

A ces difficultés structurelles s’ajoutent le déficit de la vie associative, le faible engagement sur les questions stratégiques, l’absence de construction de réseaux, la faible maitrise des filières, la difficulté à inscrire les actions dans la durée.

Des tares qui expliquent pourquoi, l’engagement pour les droits de l’homme, la liberté et la démocratie n’ont pas survécu à ce que l’on pourrait qualifier d’âge d’or des années 1990. Après la première élection présidentielle, les associations de la société civile qui étaient déjà infiltrées ont commencé à subir les coups de boutoir d’un pouvoir qui avait compris que c’est la première citadelle à démolir.

Combien de syndicalistes, militants des droits de l’homme au verbe haut, des intraitables ont fini, par la sublimation d’un décret, l’effet d’une valise de billets, renoncé à ce qui était, du en donnait l’air, d’être l’idéal de leur vie ?

Combien de militants déçus par l’attitude d’un leader qui estiment qu’en dehors d’eux, ce sera le déluge, ont fini par ranger tout esprit de sacrifice pour se contenter de leur petit métier pour faire vivre leurs familles ?

Combien de grandes gueules, prêtes à s’indigner sur le moindre des abus sont devenues soudain aphones et oubliées par l’opinion sans que l’on ne sache ce qui leur est arrivé ?

Ces exemples, on en ferait des pages s’il faut citer les acteurs qui se retrouvent dans ce descriptif, expliquent en quoi la société civile a une part de responsabilité dans l’échec de la construction démocratique que le Tchad est censé avoir commencé fin 1990. 

Entre querelles d’égos, ambitions personnelles ou simples cupidités, ceux qui ont endossé la responsabilité de se battre pour la cause des sans voix ont fini par se comporter comme des forbans, travaillant pour leur propre confort au détriment de l’intérêt général. D’où la lassitude et la désaffection qui ont fait le lit de l’apathie qui a court au sein de la société tchadienne.

Si l’expert de l’Union Européenne préconise la formation, les voyages d’études, l’échange d’expérience comme des solutions à ce déficit, il n’en demeure pas moins que le fondement idéologique reste à notre avis, le vrai problème de la société civile tchadienne. Qu’attendre d’une société civile dont l’engagement des leaders est motivé par le seul souci de la reconnaissance pour mieux négocier un strapontin? Le service que le Pasoc rendra à la nation tchadienne, c’est d’aider à mettre en place une société civile avec des leaders qui s’assureront, résistant à la corruption, que le budget alloué à la construction d’une salle de classe, d’un dispensaire a été bien exécuté. Cette société civile reste à inventer.

 

La Rédaction