Edito

Edito N° 022

D’ici 2021…

Dans quelques jours commencera le cinquième mandat du Chef de l’Etat dont la réélection à 59,92% a été confirmée le 3 mai 2016 par le Conseil Constitutionnel. Un mandat au terme duquel Idriss Déby aura passé 30 ans à la tête du Tchad. Il aura alors 69 ans, un âge pas très avancé pour un Président des tropiques.

D’ici là, il promet fondamentalement de reformer l’Etat et le système judicaire. Pour le premier cas, il s’engage à faire évoluer la forme administrative de l’Etat vers une République fédérale. La justice selon lui, devenue source de tension sociale parce que ne faisant pas bien son travail doit aussi évoluer vers un système où les magistrats seront élus, un peu comme à l’américaine.

Ces deux réformes seront à notre avis, les principaux chantiers du quinquennat qui commence. La diversification de l’économie, la plus grande attention à la jeunesse et aux femmes, etc ne seront à notre avis que secondaires.

Les annonces du président-candidat sur la forme de l’Etat et la justice ont été accueillies avec beaucoup de circonspection par plus d’un. Sur la forme de l’Etat, on lui a brandit l’échec du processus de décentralisation, une formule médiane trouvée par la conférence nationale souveraine de 1993 entre les fédéralistes (présentés comme sécessionnistes) et les partisans de l’Etat unitaire centralisé.

Sur la justice, le débat entre le Chef de l’Etat et les magistrats, ouvert lors des états généraux de la justice n’a jamais été clos. « Si nous sommes corrompus, c’est qu’il y’a un corrupteur», lui ont répondu les juges rappelant au passage la visite d’un émissaire du président-candidat aux membres de la Cour d’appel en 1996 ou encore la libération aux forceps des membres de l’Arche de Zoé pour répondre aux desiderata de Nicolas Sarkozy qui a déclaré avant sa visite à N’Djaména: «j’irai les chercher, quoi qu’ils aient fait».

Comment donc s’y prendra IDI V d’ici cinq ans? Sachant qu’à l’horizon la tempête gronde. Cette tempête n’est pas politique mais sécuritaire et économique. L’environnement sécuritaire sous régional est plus qu’incertain. Bien que vaincue militairement, l’hydre Boko Haram a de fortes chances de revenir avec plus de violence. Les dernières attaques contre le Niger avec un enregistrement vidéo, proche des méthodes de Daesh, les difficultés opérationnelles de la Force mixte et la mauvaise volonté du Nigeria de prendre quartiers dans ses territoires libérés ne sont pas de bon augure. Le sud Libyen, le Sud-Soudan, à peine né et en pleine déliquescence, son voisin la Centrafrique restent eux aussi des sujets d’inquiétude.

Sur le plan économique, la chute des cours du brut nous a montré que nous ne savons pas gérer notre économie. Une improbable remontée des cours permettra peut-être de faire tomber la fièvre sociale qui sera la principale bataille du gouvernement post-investiture. Les syndicats resteront vent-debout et les politiques sauront tirer profit de la situation. Peut-être que les chantiers à l’arrêt reprendront. Mais cela ne suffira pas à considérer que l’économie a été relancée. En plus des mesures de redressement et d’austérité, il faudra que l’on apprenne à vivre au niveau de nos moyens. Ce qui n’a jusque-là pas été le cas. Les arbitrages, gymnastiques et «serrage» de ceinture dont a fait montre le comité d’organisation de cette investiture peut être pris comme exemple de départ pour le cinquième mandat. Parce que d’ici 2021, beaucoup d’eaux couleront sous les ponts…

La Rédaction