Edito

Annus horribilis

Annus horribilis 1

Deux ans déjà que le 31 décembre, on ne verra pas le visage et la voix grave du Maréchal du Tchad à la télévision prononçant le message à la nation. Une tradition à laquelle il nous avait habitué depuis plus de trois décennies.

Depuis 20 mois, c’est désormais son fils qui a repris son fauteuil et essaye de raffermir son pouvoir et poursuivre le règne de sa famille alors qu’il a promis qu’il n’était là que pour 18 mois. Jouant des enjeux géopolitiques régionaux, de la carotte et du bâton, Mahamat Idriss Déby Itno a fait tomber les masques au fil des mois et montré qu’il est là pour rester…
Au cours de l’année qui s’achève, il a démontré aussi bien dans la gestion quotidienne de l’État que dans l’organisation du dialogue national inclusif, censé mener le pays vers un nouvel ordre politique, qu’il ne fait que du Déby sans Idriss. Avec les mêmes acteurs, certains comme Kebzabo, Gali Ngoté n’ayant changé que de camps.

Mais pour le Tchadien lamda, 2022 ce sont les incendies, les conflits, les inondations et pénuries. Certains en sont arrivés à se demander « jusqu’à quand seigneur ? » Comme si cela ne suffisait pas, le pouvoir s’est livré le 20 octobre et les jours suivants à des crimes qui marqueront à jamais l’histoire politique du Tchad et qui, quoi qu’il arrive ne resteront pas impunis. Ayant sans doute pris la mesure de la faute sur le tard, le régime manœuvre pour en minimiser la portée voire échapper aux sanctions qui planaient déjà depuis que Mahamat Idriss Déby Itno a décidé de ne pas tenir parole.

Pour les Tchadiens, 2022 n’aura été que l’annus horribilis marqué par une fracture politique entre vrais démocrates et partisans du mensonge et de le tricherie politique. Pour les premiers, il n’y aura eu, ni dialogue, ni ouverture. Mais un raffermissement en pire du système Déby. Qu’attendre d’un système où tous les pouvoirs sont confiés au seul chef de l’État qui a pouvoir de démettre, le gouvernement, Premier ministre compris, les parlementaires, tient le pouvoir judiciaire sans aucune obligation de rendre compte ? C’est ce que 2022 et le dialogue national inclusif et souverain auront servi aux Tchadiens.

Faut-il pour autant désespérer du Tchad ? Évidemment non. Pour que ceux qui prétendent aimer le Tchad tout en installant leurs familles au Maroc, en Turquie, en Égypte ou à Dubaï échouent dans leurs desseins, il faudra se dresser pour dire non à la dictature et à l’exclusion en cours. Bonne et heureuse année 2023.

La Rédaction