Santé

Suspension de l’Usaid : un coup fatal à la lutte contre le sida en Afrique

Suspension de l’Usaid : un coup fatal à la lutte contre le sida en Afrique 1

Le 24 janvier 2025, le président américain Donald Trump a signé une ordonnance instruisant le gel de 90 Jours des fonds alloués par l’Agence des Etats-Unis pour le développement international (Usaid). Le gel concerne notamment les fonds pour le plan d’urgence du président pour la lutte contre le sida (Pepfar). Cette suspension a alimenté la crainte de certaines populations sur le continent noir.

Dans les caisses de la lutte contre le paludisme, la tuberculose et le Vih Sida quelques 78 millions de dollars manque à l’appel. L’Agence américaine de l’aide au développement est suspendue pour 90 jours. Plus d’essai clinique. A travers le continent africain, cette suspension fait naître une grande stupeur, ainsi que la crainte d’un brutal retour en arrière, alors que l’épidémie du Vih semblait sous contrôle au cours de la dernière décennie, avec près de 25 millions de vies sauvées.

« Cet arrêt du financement peut exposer les personnes vivant avec le Vih à un risque accru immédiat de la maladie et de décès tout en sapant les efforts de prévention de la transmission du virus parmi les populations-clés des pays les plus touchés par la pandémie. Pourtant, une observance assidue et régulière des traitements contre le Vih signifie Zéro transmission du virus », écrit Jérôme Salomon, sous-directeur général de l’Organisation mondiale de la santé, sur le réseau social LinkedIn.

Qu’est ce qui va disparaitre ?

« 70% de tous les fonds pour le Vih proviennent du gouvernement américain. Nous estimons que si le Pepfar n’était pas reautorisé entre 2025 et 2029 et que d’autres ressources n’étaient pas trouvées pour la riposte au Vih, le nombre de décès dus au Sida augmenterait de 400% » a mis en garde Christine Stegling, Directrice exécutive adjointe de l’Onusida. Précisant que cela représente « 6,3 millions de décès liés au sida qui se produiront à l’avenir ».

Crucial pour les populations, le don des Etats Unis constituent la principale source de financement du Pepfar qui outre l’achat de médicaments auprès des laboratoires pharmaceutiques, subventionne le recrutement et la consolidation d’équipes médicales formées au dépistage, à la prévention et à l’accompagnement aux soins de près de 20 millions d’africains dans environ 30 pays du continent. Son gel soudain a déjà des conséquences a très court terme sur des dizaines d’Ong qui travaillent en Afrique. Ceux-ci ont dû stopper leurs projets du jour au lendemain. En Éthiopie par exemple, selon Le Programme commun des Nations Unies sur le Vih/sida (Onusida), 5000 contrats d’agents de santé publique finance par l’aide américaine ont été résiliés.

« Nous craignons une situation catastrophique en Afrique avec la suspension de cette aide. Chez nous au Tchad, cela aide beaucoup à faire face à la situation humanitaire due à la crise sécuritaire. Beaucoup d’enfants qui souffrent de malnutrition à l’Est survivent grâce à des Ong qui opèrent dans la zone. Prisent en charge par des associations qui dépendent d’une Ong international. Cette annonce plonge des dizaines d’Ong dans une extrême fragilité tant elles sont dépendantes de l’Usaid », confie Paul, médecin dans une organisation humanitaire basée à Farchana.

Ce dernier s’inquiète également sur le devenir des patients. « Nous ne savons pas combien de temps cette décision va durer. Nous sommes surtout soucieux pour les patients. Que vont-ils devenir sans accompagnement ? », s’interroge-il.

Plusieurs agences des Nations Unies ont également mis en garde, contre les effets néfastes des coupes opérées par la nouvelle administration américaine en matière d’aide humanitaire et ont appelé Washington à conserver sa position de « leader » de l’aide internationale.

De son côté, Le Fonds des nations Unies pour la population (Unfpa), note que le gel américain les a contraints de suspendre leurs programmes en Asie. « Ces services suspendus sont tous financés par des subventions américaines. Ils constituaient une bouée de sauvetage pour les femmes et jeunes filles en situation de crise, notamment en Asie du Sud » a déploré Pio Smith, directeur de l’Unfpa lors d’une conférence de presse à Genève.

Urgence d’une souveraineté sanitaire en Afrique

Si les décisions soudaines et drastiques prises par l’administration Trump ont été saluées par plusieurs commentateurs qui affirment que, « c’est le signal d’alarme dont le continent a besoin pour se libérer de la dépendance à un système d’aide au développement » et d’acquérir enfin, « une souveraineté sanitaire », la question que l’on se pose est comment feront les gouvernements africains pour atténuer le choc de ce gel ?

Les défis actuels invitent les Etats africains à une réflexion sur les stratégies de financement et de mobilisation efficace de leurs ressources pour venir en aide aux malades. Il s’agit notamment de prévenir des millions d’infections par le Vih, d’améliorer les tests de dépistage et de fournir des traitements antirétroviraux vitaux.

Au Tchad le nombre de de Personne vivant avec le Vih sous traitement antirétroviral en 2023 est de 63845 et le taux de prévalence du Vih est de 1,3 % chez les femmes âgées de 15 à 49 ans, selon un rapport de l’Onusida.

Kedaï Edith