Edito

Edito du N°011

Pauvres journalistes

La vérité, la solidarité, la neutralité, l’honnête et l’indépendance sont les valeurs fondamentales du journalisme. Elles permettent au journaliste de collecter, traiter  les informations avant de les rendre publics en toute indépendance et objectivité. Plusieurs instruments juridiques nationaux et internationaux garantissent la liberté d’expression, de pensée, diffusion et de la presse. Ipso facto, la presse est libre.  Nul ne peut douter de cette réalité de la presse au Tchad.  On peut la constater à travers le nombre de titres (des journaux et les informations des radios et télévisions privées). Mais,  la presse publique et privée ne sont   indépendantes.

Nombreux sont ces journalistes qui sont menacés, arrêtés, torturés et intimidés. D’autres prennent le chemin de l’exil.  Dans la presse publique, l’autocensure pèse sur les journalistes rendant l’environnement et le travail difficile. Cela se caractérise par le traitement partisan des informations par les journalistes des médias publics de peur d’encourir aux représailles. Pour se défendre, certains brandissent la ligne éditoriale qui est d’aider le gouvernement dans sa politique oubliant qu’il s’agit d’un service public au sein duquel l’opposant et le pro-pouvoir ont les mêmes droits.  La résignation est la solution pour d’autres. Ces journalistes travaillent au jour le jour dans une psychose indescriptible. C’est ce qui encourage le griotisme à travers les reportages élogieux aux hommes politiques et autorités de la place.  Cette manière d’étouffer les talents favorise la culture de la médiocrité notamment la montée en puissance des « journalistes, feuilles de choux » qui sacrifient les principes déontologiques et d’éthique du métier sur l’autel des intérêts égoïstes. Et pourtant, leur rôle est d’informer, d’éduquer, de divertir et de dénoncer. Il est au service de  son public en lui donnant des informations vraies, qui lui permettent de vivre dignement. Malheureusement ce n’est pas le cas.

Dans le secteur privé, les journalistes broient du noir. Mal payés, ils  vivent dans une précarité très avancée. Des employeurs incapables de couvrir les charges à causes des ressources limitées et la cherté de vie endémique. Cette situation ouvre la voie à la mendicité et à l’arnaque.  Ainsi, ils écrivent des articles incendiaires pour discréditer  une personnalité quelconque ou pondent des articles      élogieux dans l’espoir de lui soutirer d’argents. Or, cette pratique est contraire aux principes régissant le métier. Par conséquent, elle compromet l’objectivité et la neutralité du journaliste dans le traitement des informations. Conséquence,  plus d’indépendance. La notion du professionnalisme est mise sous le paillasson. Bref, c’est la presse de caniveau qui nait  alimentée par ceux qu’un confrère a appelé des « journalistes à gage ».

Les médias sont aussi victimes de taxes exorbitantes, du prix élevé d’impression, du difficile accès aux sources d’informations et à la publicité, du soutien non conséquent de l’Etat et la contrefaçon des journaux. Toutes ces situations ne favorisent pas le développement de la presse. Elles compromettent dangereusement l’indépendance des médias au Tchad en général et ceux du privé en particulier. 

Au regard de ces faits, il est urgent de redorer l’image du métier en s’abstenant des pratiques qui nuisent à la profession. Pour ce faire, il faut  lui garantir la liberté, la neutralité et l’autonomie financière. Pour arriver, les médias tchadiens tant       publics que privés doivent chercher des nouvelles sources de financement en mettant en place des stratégies de l’autofinancement pouvait les aider à sortir de      l’ornière. Les innovations, la création des valeurs et des richesses à travers         l’entrepreneuriat médiatique permettent de parvenir à l’autonomie financière, gage de l’indépendance et à la liberté. C’est pourquoi, il importerait aux médias d’initier des projets de développement, développer des pools de consultances, créer des fermes, des maisons de productions et d’édition, de locations et créer des centres culturels, d’hébergement  et de formation ou d’autres activités génératrices de     revenus pouvant booster l’économie des médias. C’est la responsabilité              managériale des professionnels et responsables des médias. Et ce, pour une presse libre et indépendante. Car un homme qui a faim n’est pas un homme libre.

La Rédaction