Edito

Edito N°068

Edito N°068 1

De la violence des propos sur les réseaux sociaux

Au cours de sa prise de parole le 28 novembre 2017 à l’occasion de la journée nationale pour la paix et la concorde, le chef de l’Etat s’est inquiété, une nouvelle fois sur la violence, le langage de haine que s’échangent ses compatriotes sur les réseaux sociaux notamment facebook.

De mémoire d’observateurs, c’est la seconde fois, en dix mois, que Idriss Déby Itno revient sur le sujet. En février 2017 au lendemain de l’élection de notre compatriote, Moussa Faki Mahamat à la présidence de l’Union Africaine, il a indiqué, répondant à une question que s’il était sûr de pouvoir quitter le pouvoir laissant un Tchad où compatriotes cohabitent pacifiquement, il l’aurait fait. « Mais avec ce que les Tchadiens se disent sur les réseaux sociaux, c’est inquiétant » avait confié le chef de l’Etat.

Le président aurait dû pousser la logique à son terme et admettre que cette situation illustre l’échec de sa gouvernance dans la construction nationale, lui qui, plus que tous ses prédécesseurs en a eu le temps et les moyens.

Les réseaux sociaux ne sont en vérité qu’un exutoire, le seul espace de liberté où on peut s’exprimer librement sans risque, jusque-là encore, de subir les foudres de la loi dès lors qu’il ne s’agit pas d’apologie du terrorisme.

Les injures et autres noms d’oiseaux auxquels on a eu droit ces dernières semaines sont en vérité la manifestation d’un état d’esprit qui prévaut encore chez certains compatriotes, heureusement, minoritaires mais qu’on n’a jusque-là rien fait pour combattre. Le mal de vivre ensemble qui gangrène la société tchadienne aujourd’hui est la conséquence de l’injustice sociale, de l’absence d’Etat et de l’impunité.

Il suffit de relire le rapport du haut comité technique d’appui aux réformes pour s’en convaincre. Pas plus que les autres, le régime du Mps n’a pas fait assez pour l’état de droit, la justice et la liberté qu’il prétend défendre depuis plus de 20 ans.

L’injustice est mère des tensions sociales. L’absence de liberté génère des logiques de contournement aux conséquences imprévisibles. Le manque de perspectives fait de la jeunesse le terreau fertile à toutes les tentations extrémistes. Ce n’est pas nous qui le disons. Ce sont des faits établis que tout gouvernant soucieux de son peuple et de son avenir doit surveiller et prévenir. 

Si les Tchadiens en sont arrivés à traiter les autres d’esclaves, c’est que l’Etat garant de l’unité nationale n’a pas su faire intégrer la notion d’égalité à tous. Si les Tchadiens en sont arrivés à traiter, et c’est condamnable, les autres de métis, c’est que, là aussi l’unité entre fils de ce pays n’a été jusque-là que vain mot, paroles, paroles…

Il revient donc au chef de l’Etat de dépasser la phase du discours pour agir. Agir pour que la veuve et l’orphelin ne soient pas maltraités, agir pour que les meilleurs soient promus aux meilleures places, agir pour que, face à la justice tous les tchadiens soient égaux, agir pour que les fils de ce pays aiment et chérissent leur mère-patrie. C’est le seul curatif à l’apatridie.

La Rédaction.