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Violences basées sur le genre : beaucoup reste à faire

Violences basées sur le genre : beaucoup reste à faire 1

Au Tchad, des femmes sont souvent victimes des violences de tous genres : physiques, morales ou psychologiques. Entre les principes et la réalité sur le terrain, le fossé est tellement grand.

Le mercredi 18 novembre dernier à Goygamla, un village de la province du Mayo Kebbi Ouest, une femme enceinte a succombé des suites des coups violents infligés par son mari, pour apprend-on, une affaire de repas non servi. Cet épisode sombre qui a suscité de l’indignation reflète le quotidien de nombreuses femmes et filles, qui, pour un oui ou un non sont systématiquement battues. D’après l’enquête démographiques et de santé et à indicateurs multiples au Tchad (Eds-Mics) 2014-15, 1 femme sur 5 est victime de violences physiques et 12% d’autres des violences sexuelles chaque année.
«7 % des femmes enceintes ont subi des violences physiques pendant une grossesse. Plus d’un tiers des femmes, soit 35 % ont été victimes d’actes de violence, physique, émotionnelle ou sexuelle. Près de trois femmes sur dix, soit 29 % ont subi des actes de violence physique et 12 % d’autres ont subi, des actes de violence sexuelle », révèle cette enquête qui comprend une tranche d’âge des femmes allant de 15-49 ans. Ce qui fait du Tchad l’un des pays ayant enregistré le plus grand nombre des violences faites aux femmes. Et souvent, le mari est cité comme l’auteur des actes de violence. La violence conjugale bat ainsi le triste record avec un niveau particulièrement élevé parmi les femmes en rupture d’union. « Les pourcentages des femmes qui ont été victimes de violence conjugale sont plus élevés que dans les autres catégories de femmes. Une femme sur deux, soit 50 % a déclaré avoir subi des violences sous quelque forme que ce soit de la part du conjoint le plus récent », illustre le rapport.
Au nom de l’honneur ou la dignité familiale, des nombreuses victimes vivent au quotidien aux côtés de leurs bourreaux sans dire mot. « Parmi les femmes ayant subi des actes de violence, quelle qu’en soit la forme, 44 % n’ont pas recherché d’aide et n’ont parlé à personne des violences dont elles avaient été victimes », ajoute l’enquête.
Face à cette situation, l’écrivaine et avocate Me Clarisse Nomaye qui salue toute initiative de sensibilisation pour limiter les violences faites aux femmes, insiste sur l’honnêteté de la femme elle-même. Mais c’est l‘impact de ces genres d’activités dans le changement de la société qui pose problème. « Si nous voulons éliminer les violences envers les femmes, il faut changer de mentalité et ce changement doit commencer par les femmes. Elles doivent être honnêtes avec elles-mêmes », précise-t-elle, appelant à faire barrage à l’hypocrisie. « Vous allez rencontrer des femmes qui crient haut et fort droit des femmes mais quand elles revêtent la tenue de belle-mère ou belle-sœur, elles tiennent un autre langage vis-à-vis des autres femmes. Elles encouragent de manière indirecte leurs frères à être violents vis-à-vis des autres filles. », poursuit Me Clarisse Nomaye, qui continue « Il y a aussi des femmes qui vont encourager leur sœur ou fille à rester dans un foyer violent pour la richesse d’un époux ou au nom de l’honneur de la famille mais aussi des femmes elles-mêmes violentes vis-à-vis des autres filles », témoigne l’avocate qui appelle ses sœurs à l’honnêteté dans cette lutte.
Cette lutte doit commencer d’après elle, dans nos familles. « Commençons par lutter dans notre milieu quelque soit notre statut. Si nous sommes sérieuses par rapport à cette lutte, nous allons amener les hommes et la société toute entière à nous prendre au sérieux et à nous accompagner dans cette lutte», ajoute-t-elle.
« L’idéal est de changer de mentalité. Et cela doit passer par la sensibilisation et surtout l’éducation dans nos familles. J’ai toujours l’habitude de dire, si nos enfants sont éduqués à respecter ou à considérer la femme comme étant un être à part entière, ils auront un autre regard sur cette fille quand ils seront grand. Mais si vous les éduquez au mépris de la femme, ils vont traiter comme des êtres secondaires » conclut-elle.

Stanyslas Asnan