Societé

‘’Dakouna espoir’’, la quête de dignité pour les enfants de la rue

‘’Dakouna espoir’’, la quête de dignité pour les enfants de la rue 1

Créée en 2015, l’association Tchado-Star dans son souci de venir en aide aux enfants défavorisés, a mis en place le projet ‘’Dakouna Espoir’’, axé sur la scolarisation et la formation aux métiers professionnels des enfants de la rue en vue de leur réinsertion sociale.

Il est à peine 7h du matin de lundi. Melom 11 ans, teint basané, sourire aux lèvres se presse pour aller à l’école. Pour cette gamine en classe de CE1, étudier est un rêve qui se réalise. La vie n’a pas toujours été facile pour la petite Cynthia. Elle a dû fuir avec sa maman et sa petite sœur les exactions de la secte Boko haram au Nigeria où ils vivaient. A peine arrivée dans son village Bodo, dans le Logone oriental, elle perd sa maman et se retrouve à N’Djaména chez son oncle. C’est là, que le cauchemar commence pour elle. La femme de son oncle ne voulant pas d’elle, va lui faire subir des supplices de tout genre et fini par la chasser de la maison. « Pour un rien elle me bastonnait, me disant de quitter sa maison.  Ne pouvant plus supporter, je me suis enfui et j’ai erré dans la rue. C’est là que l’équipe du centre ‘’Dakouna espoir’’ m’a trouvé et ramené ici », nous confie- t- elle.

Abdoulaye, 19 ans, a rejoint le centre pour la danse qui est sa passion. Privé dès sa naissance de l’amour maternel du fait que sa maman malade ne pouvait pas s’occuper de lui, ce benjamin d’une fratrie de 8 enfants s’est retrouvé dans les rues de Guelendeng puis s’est retrouvé à N’Djaména où il a été récupéré par le centre.  « Au centre, je me sens bien, nous vivons comme une famille. Dans la rue, c’est la loi de la jungle, on doit tout le temps être sur nos gardes. Quand je danse j’oublie tout. Mais parallèlement le centre m’a permis aussi d’apprendre une activité professionnelle qui me plait, la soudure », raconte –t-il.

Ils sont nombreux ces enfants et jeunes de la rue comme Cynthia et Abdoulaye qui ont eu la chance grâce au projet social ‘’Dakouna espoir’’ d’aller à l’école ou de se former aux métiers.

Mbainoné Abraham 13 ans en classe de CM1 à longtemps traîné dans la rue préférant mendier. « Je venais parfois au centre pour danser mais petit à petit ils m’ont inculqué certaines valeurs et m’ont appris à vivre en famille et à la fin, j’y suis resté ».

Selon le fondateur de l’association Tchado-Star et initiateur du projet, Aleva Ndavogo Jude, l’initiative qui vise la réinsertion éducative et socio professionnelle des enfants vivant dans la rue, lui est venu de son humanisme et du besoin de venir en aide à ces enfants et jeunes désabusés qui préfèrent la rue au cadre familial. « Je comprends mieux ces enfants car, j’ai été dans ces mêmes conditions. Personne ne croyait en moi, mais contrairement à eux, moi j’avais la danse comme exutoire. Et heureusement j’ai eu la chance de me battre pour arriver là où je suis. C’est pour cela que j’ai voulu partager cette expérience, ce savoir avec eux », explique-t-il.

« Au début, nous avons commencé à danser en plein air avec trois enfants, et au fur et à mesure d’autres enfants nous ont rejoint. Nous sommes passés de 03 à 15 enfants et vu le nombre qui augmentait chaque jour. Nous avons cherché un local pour pouvoir mieux les cadrer », informe Aleva Ndavogo.  Le but au départ clarifie- t-il, était juste d’initier les enfants au plaisir de la danse, mais je me suis rendu compte que certains de ces enfants étaient là pour d’autres motivations comme le besoin de s’instruire, de travailler et de réaliser un jour leurs rêves. À ceux-là aussi, nous avons tendu la main.

Dans notre stratégie, souligne Jérémie Markila, intendant et membre de l’équipe d’orientation mobile du centre, « nous nous nommes dit qu’en apprenant la danse à ces enfants, nous pouvons aussi gagner leur confiance et établir un lien avec eux. Pour cela, une équipe mobile a été mise en place pour se déployer dans les rues à la rencontre des enfants de la rue. Nous nous approchons d’eux, les ciblons et essayons de gagner leur confiance, tout en les identifiants. Nous rencontrons ensuite leurs familles afin de faire une médiation familiale pour une possible réconciliation. Parce que nous savons qu’un enfant à toujours au fond de lui (même s’il ne le dit pas), le désir de rentrer un jour à la maison ». La communication avec ces enfants doit être sensible, délicate précise- t-il. Compte tenu de l’extrême pauvreté de leurs familles, de l’instabilité des ménages, il y’a des problèmes de survie et d’attrait à la liberté qui s’impose chez eux.

Un havre de paix et de convivialité

Situé à chagoua dans le 7ème arrondissement de la ville de N’Djaména, le centre ‘’Dakouna espoir’’ (composé du mot ‘’Dakouna’’ qui veut dire en arabe local ‘’nous sommes là’’ et espoir qui est un mot français) constitué de 8 pièces aux murs décrépis, peint en blanc, est un véritable foyer où ces enfants de la rue s’épanouissent.

Le centre a depuis sa création, sensibilisé plus de 575 enfants à travers la danse parmis lesquels 208 enfants ont été retirés de la rue pour réintégrer leurs familles. Sur les 62 enfants vivant au centre, 10 ont pu renouer avec leurs familles. 50 dont 6 filles sont inscrites à l’école et 12 autres en formation aux métiers professionnels. « En ce qui concerne la réadaptation de ces gosses à l’école, les pairs éducateurs du centre s’occupent de leur remise à niveau avant leur admission en classe.  Cela se fait par des cours d’alphabétisation qui permettent de savoir à quel niveau d’étude l’enfant s’est arrêté », indique le formateur Fizouné Richard.

Ce travail de longue haleine exécuté par l’équipe du centre, rencontre de nombreuses difficultés vu que l’éducation d’un enfant nécessite aussi des moyens. « Nous manquons cruellement de ressources financières et vivons tant bien que mal grâce à la bonté de personnes charitables et nos partenaires. Mais ce n’est pas suffisant. Il y’a le problème de la prise en charge des enfants, le besoin d’un local propre à nous, de l’alimentation et le transport des enfants… qui perdurent », déplore le fondateur. Au moment où nous mettons cet article en ligne, le centre menace de fermer faute de moyens

   Fakeugnba Kedai Edith