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Présidence du Tchad, un pouvoir légitime n’a pas besoin de se barricader

Présidence du Tchad, un pouvoir légitime n’a pas besoin de se barricader 1

Ce que certains de nos confrères et d’autres personnes qualifient d’« incident », survenu ce jeudi 21 août devant le Palais Toumaï, constitue en réalité une atteinte grave à l’intégrité physique d’un Tchadien de trop. Un homme, dont l’identité n’a toujours pas été révélée à ce jour, a été visé par balle.

La première réaction fut celle du médecin traitant, qui a affirmé que la victime disait « souhaiter rencontrer Mahamat Kaka ». Alors qu’il avait été annoncé mort, cet homme aurait survécu à ce drame.

la Présidence de la République, censée incarner la nation et servir le peuple, est devenu un périmètre de terreur où la simple action de circuler est passible de la peine capitale sans procès. Cette interdiction absolue de franchir une voie publique, édictée au nom de la sécurité, interroge profondément sur la nature du pouvoir qu’elle est supposée protéger et sur le rapport qu’il entretient avec ceux qu’il gouverne.

La présidence n’est pas un bâtiment comme les autres, elle est la maison du peuple. C’est le lieu où les destins se décident, où la volonté populaire est censée se concrétiser. Elle devrait être un symbole d’accessibilité, de transparence et de fierté nationale.

Or, à N’Djamena, ce symbole s’est mué en forteresse où les hommes en armes dressent une barrière non seulement physique, mais aussi philosophique. Ce dispositif traduit une vision où le peuple est perçu non comme un partenaire légitime, mais comme une menace. En interdisant l’accès, on n’interdit pas seulement une route ; on interdit la proximité du peuple avec son chef suprême.

Une sécurité qui tue : un mauvais signal envoyé au reste du monde

Le caractère le plus odieux de cette interdiction réside dans son application brutale et létale. Le fait que plusieurs Tchadiens aient été tués par balle pour avoir emprunté cette voie est un scandale absolu qui soulève une indignation nationale voire au-delà.

Cette violence envoie un message clair : la vie de ceux qui détiennent le pouvoir vaut infiniment plus que celle de ceux qu’ils sont censés servir. Elle instaure une zone de non-droit où la raison d’État, ou ce qui en tient lieu, prime sur le droit le plus fondamental, celui à l’existence.

La peur comme mode de gouvernance

Au-delà de l’argument sécuritaire souvent avancé, il faut voir dans ce dispositif la manifestation d’une gouvernance par la peur. Un pouvoir confiant de sa légitimité n’a pas besoin de se barricader de la sorte.

L’isolement physique de la présidence est le symptôme d’un isolement politique. Il révèle une méfiance profonde, une peur de la contestation, du regard des citoyens.

La sécurité d’un chef d’État et des institutions se construit par la justice, la transparence et la légitimité, bien plus solidement que par des mitrailleuses et des interdits mortels. Elle se construit avec le peuple, pas contre lui.

Il est temps que les autorités tchadiennes fassent le choix courageux de l’ouverture de cette voie. Il est temps de rendre l’avenue devant la Présidence au peuple tchadien, pour qu’il puisse y circuler librement, en paix, et sans craindre pour sa vie.

Deuh’b Zyzou