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Robert Mugabé : le parcours

Robert Mugabé : le parcours 1

L’ancien président zimbabwéen est mort ce vendredi 6 septembre 2019 à Singapour, où il était hospitalisé depuis avril dernier. Il était l’une des figures de la décolonisation en Afrique. Il a été contraint de quitter le pouvoir le 21 novembre 2017 à la suite d’une procédure de destitution lancée par son propre parti.

Né le 21 février 1924 à Kutama, au nord-ouest d’Harare, en Rhodésie du Sud (actuel Zimbabwé), Robert Gabriel Mugabe, premier président noir du pays a été abandonné par son père à l’âge de 10 ans. Il vécut avec sa famille dans une mission catholique où il a poursuivi sa scolarité avant d’aller au collègue.

Il quitte ensuite son village natal Kutama pour Fort Hare, en Afrique du Sud pour étudier l’anglais et l’histoire avec pour objectif de devenir enseignant. C’est au pays de Madiba qu’il va côtoyer de nationalistes africains dont  Julius Nyerere, qui présidera la Tanzanie plus tard. En 1957, il devient enseignant au Ghana, la première colonie d’Afrique indépendante.

Imprégné par l’idéologie marxiste et le nationalisme africain, il va créer en 1963, trois ans après son retour au bercail son parti, l’Union nationale africaine du Zimbabwe (Zanu), né des cendres de l’Union du peuple africain au Zimbabwe (Zapu) de Joshua Nkomo. Objectif, libérer le pays du pouvoir des colons britanniques blancs qui ne représentent que 3 % de la population. Un an après la création de son parti, (1964) Robert Mugabe est emprisonné avec d’autres activistes pour ses critiques vis-à-vis du régime. C’est en prison qu’il passe des diplômes par correspondance en économie et en droit.

Libéré en 1975, il s’installera en Mozambique pour mener une guérilla contre le pouvoir du premier ministre Ian Smith. Il prendra la tête de la branche militaire de la Zanu. La guerre civile de 1975 à 1979 fera au moins 30 000 morts. Les accords de Lancaster House à Londres en 1979 à la suite des négociations entre les représentants de la guérilla et le pouvoir ont permis de mettre fin à cette guerre et d’annoncer l’organisation des élections législatives en 1980.

Le parti nationaliste de Robert Mugabé, l’Union nationale africaine du Zimbabwe (Zanu) va remporter avec une large majorité. Ce qui lui permettra de devenir le 18 avril 1980 le premier ministre du nouvel Etat devenu indépendant sous le nom de Zimbabwe. Un gouvernement de coalition sera composé et regroupera les cadres de la Zanu et de la Zapu.

La minorité blanche sera représentée au Parlement avec 20 % des sièges. Elu à la tête de son pays, il prendra des mesures notamment la réforme agricole pour améliorer le niveau de vie de la population. Les terres possédées par les blancs seront expropriées et données à des fidèles du régime ayant peu de connaissance en la matière et conduira le pays dans la misère.

La Zanu et la Zapu vont fusionner en Zanu-Pf en 1987. Mugabe sera élu en décembre de la même année président du pays. L’homme fort du Zimbabwe va gérer le pays d’une main de fer, instaurant ainsi un régime totalitaire. La minorité blanche qui a commencé à perdre ce qui lui restait de pouvoir va fuir le pays. Mugabe sera réélu deux fois à la tête de son pays, en 1990 et 1996.

La gestion opaque du pays fera grincer des dents et verra naitre des contestations non seulement au sein de la population mais de son propre parti, la Zanu-Pf. C’est ainsi que le Mouvement pour le changement démocratique (Mdc), dirigé par Morgan Tsvangirai sera créé en 2000. Lors des élections de 2000, Robert Mugabe gagne à nouveau mais ces élections seront contestées pour fraudes. Comme sanctions de la communauté internationale, le pays sera exclu du Commonwealth.

En mars 2008, de nouvelles élections présidentielles et législatives ont lieu. Le président essuiera de revers au premier tour. Tsvangirai arrive en tête mais le pouvoir va réprimer violemment l’opposition, ce qui permet à Mugabe d’être réélu.

Le pays plongera dans l’hyperinflation et de produits alimentaires feront défaut. Des billets de 100 milliards de dollars zimbabwéens seront émis. Le népotisme et la gabegie du clan présidentiel conduira à une contestation de plus en plus accentuée.

Le pouvoir sera contraint par la pression internationale à s’ouvrir. Morgan Tsvangirai deviendra premier ministre d’un gouvernement d’union nationale en février 2009 mais la tension ne cesse de monter. En 2013, un nouveau scrutin présidentiel a lieu et le président Mugabé sera réélu, l’opposant Tsvangirai dénonce de multiples fraudes et conteste le résultat.

Le souhait le 5 novembre 2017 de Mugabe de voir sa femme, Grace, lui succèder au pouvoir sera la goutte d’eau qui fera déborder le vase. L’armée intervient pour placer le couple présidence en résidence surveillée. Après la procédure de destitution lancée par son propre camp, Robert Mugabe démissionne le 21 novembre. L’actuel chef d’Etat Emmerson Mnangagwa élu à la présidence de 2018. C’est lui qui a annoncé sur Twitter la mort de son prédécesseur.

Stanyslas Asnan